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Philippe Ariès dans son temps

 Philippe Ariès ne fut pas seulement un historien. La singularité de son œuvre tient dans une large mesure à la richesse de ses activités et à l’héritage d’une culture politique qui a orienté sa vocation d’historien.

 Son œuvre, indissociable de son itinéraire politique et intellectuel, découle d’un choix existentiel sur lequel il s’est longuement expliqué dans ce livre pionnier que fut Le Temps de l’Histoire (Editions du Rocher) en 1954. Dans cet essai d’égo-histoire avant l’heure, le jeune historien montrait comment son histoire personnelle enracinée dans une culture traditionaliste avait déterminé ses choix méthodologiques. On ne se lance pas dans l’histoire par hasard, comme il l’écrit, en février 1973, dans “Une interprétation tendancieuse de l’histoire des mentalités” (repris dans Pages retrouvées, en 2020) :

 « Nos réflexions sont inspirées par nos expériences personnelles et vécues. On ne fait pas de l’histoire des mentalités comme on fait de la comptabilité commerciale. Il faut une raison et une passion. »

 Philippe Ariès a vécu son siècle avec passion. Rien ne l’a laissé indifférent. Des années trente à la guerre d’Algérie en passant par Vichy, il s’est engagé. Militant, journaliste, éditeur, documentaliste, historien, Philippe Ariès a rencontré des figures marquantes du XXe siècle comme Charles Maurras, Daniel Halévy, Gabriel Marcel, Pierre Boutang, Michel Foucault, Joseph Czapski, Ivan Illich, Pierre Vidal-Naquet, Françoise Dolto, et les « nouveaux historiens » comme Georges Duby, Michel Vovelle, Jacques Le Goff.

 Historien français, il a pourtant d’abord été reconnu aux Etats-Unis avec son livre sur l’Enfant et la vie familiale sous l’Ancien Régime quand la famille et l’enfance deviennent des enjeux de société au cours des années soixante. En France, mai 68, donne une actualité nouvelle à ce livre, d’abord paru en 1960, qui connaît une deuxième vie, avec la réédition au Seuil en 1973. Rarement livre d’historien fut autant commenté dans la presse magazine alors naissante, dans les revues pédagogiques ou liées à la petite enfance.

 Historien de grand talent, Philippe Ariès est un remarquable vulgarisateur. Si bien qu’après l’enfant et la vie familiale, ses recherches sur la mort passionnèrent tout un public dans des milieux très divers. Chez les historiens bien-sûr, mais aussi chez les anthropologues, les sociologues, les médecins.

 Les différentes entrées proposées ici permettent de mieux appréhender les multiples facettes de l’historien qui fut aussi militant, journaliste, éditeur et documentaliste. Et de voir dans quelle mesure Philippe Ariès pesa sur les débats de son époque.