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Victor-Lucien Tapié (1900-1974)

samedi 24 janvier 2015, par Guillaume Gros

Auteur, en 1957, d’un ouvrage majeur régulièrement réédité Baroque et classicisme, Victor-Lucien Tapié (1900-1974) a été notamment un spécialiste de l’histoire de l’Europe centrale.

Agrégé d’histoire en 1925, Victor-Lucien Tapié est profondément influencé, durant sa jeunesse, par son oncle, le philosophe Célestin Bouglé (1870-1940) qui lui fait rencontrer entre autres le couple d’Elie Halévy ou l’écrivain et poète Jean-Louis Vaudoyer qui l’initie à l’Italie.

L’historien consacre sa thèse, publiée aux PUF en 1934 à La Politique étrangère de la France et le début de la guerre de Trente Ans (1616-1621). En 1952, Victor-Lucien Tapié touche un public plus large en publiant chez Flammarion La France de Louis XIII et de Richelieu, ouvrage alors remarqué par Philippe Ariès.

La France de Louis XIII vue par P. Ariès

« La nécessité d’une présentation continue et totale (totale, et non pas exhaustive), a conduit M. Tapié à réhabiliter, au moins implicitement, mais en la renouvelant, l’histoire politique et biographique, c’est-à-dire l’histoire des élites et des individualités exceptionnelles (par la naissance ou par le talent), qu’on néglige aujourd’hui au profit des structures collectives. Et il faut convenir qu’une telle réaction était nécessaire, pourvu que ces minorités aristocratiques ne fussent pas séparées des conditions sociologiques de leur temps. Ainsi replongé dans son milieu, le « grand homme » - homme d’Etat, homme de pensée - reprend une importance que lui conteste l’historiographie contemporaine. D’où l’intérêt du Richelieu de M. Tapié, dans les limites bien marquées où le Cardinal appartient à son époque, et, toutefois, la dépasse. » [J’ai lu, mai 1953, repris dans P. Ariès, Pages retrouvées, 2020]

Baroque et classicisme (1957), coll. "Civilisations d’hier et d’aujourd’hui "

Issu plutôt de l’école historique méthodiste mais ouvert aux Annales de Marc Bloch et Lucien Febvre, Victor-Lucien Tapié porte un regard très bienveillant sur Le Temps de l’histoire publié par Philippe Ariès en 1954 [1]. Trois ans plus tard, Philippe Ariès édite Baroque et Classicisme dans la collection « Civilisations d’hier et d’aujourd’hui » qu’il dirige depuis peu chez Plon.
Victor-Lucien Tapié en définit le projet au début de sa préface : « C’est un aspect de la civilisation moderne que voudrait éclairer ce petit livre où l’on ne s’attend pas à trouver une histoire complète du baroque et du classicisme, avec l’analyse exhaustive de leurs œuvres et de leurs monuments. »

La réédition : la collection "Civilisations et mentalités" (Mandrou/Ariès)


 L’ouvrage qui connaît un réel succès tant sur le plan éditorial que scientifique fait l’objet d’une réédition, en 1972, dans la collection « Civilisations et mentalités » codirigée par Robert Mandrou et Philippe Ariès, toujours chez Plon.

Texte de la quatrième de couverture :

« Cet ouvrage est la seconde édition, profondément remaniée et complétée de l’étude parue en 1957 sous le même titre, qui a été saluée par Pierre Charpentrat comme une date dans la connaissance du baroque en France. Le lecteur retrouve ici la même méthode d’explication, qui cherche à éclairer l’œuvre d’art par le climat social et mental, dont seules les circonstances historiques peuvent rendre compte ; la recherche est élargie à des pays que la première édition ne présentait pas, à commencer par l’Angleterre. L’axe de la démonstration demeure le même : le baroque est venu d’Italie, continuant la Renaissance, mais dans un climat tout à fait différent, celui du triomphe de l’Église et des monarchies, celui de la consolidation, dans toute l’Europe, de la grande propriété foncière. Enfin, ce livre rénové a fait une plus large place à l’épanouissement d’un baroque triomphal qui se prolonge à la fin du XVIIe, voire du XVIIIe siècle.

Enrichi dans son texte et dans son illustration, ce nouveau Baroque et classicisme entend éclairer, à l’aide de quelques exemples, un aspect, longtemps méconnu en France, de la civilisation moderne. »

AU Centre Roland Mousnier et à l’Institut

 Sur le plan institutionnel, Victor-Lucien Tapié, participa activement aux travaux du Centre de recherches sur la civilisation de l’Europe moderne créé, en 1957, à la Sorbonne par Roland Mousnier.

 Par ailleurs, il est élu à l’Académie des sciences morales et politiques, en 1963, au fauteuil de l’historien Daniel Halévy. A la fin de sa carrière, Tapié publie encore Monarchies et peuples du Danube (Fayard, 1969) ainsi que Retables baroques de Bretagne et spiritualité du XVIIe siècle (PUF, 1972) en collaboration avec Jean-Paul Le Flem et Annick Pardailhé-Galabrun.


Voir en ligne : Victor-Lucien TAPIÉ. Relire Baroque et classicisme , sous la dir. de H. Rousteau-Chambon et C. Mazel, PUR, 2014


[1Cf. la lettre de Victor-Lucien Tapié à Philippe Ariès du 17/04/1954 publiée dans la réédition du Temps de l’histoire au Seuil en 1986